Argentine – J707 et J708 – Il commence à faire un peu frais… mais c’est tellement beau !

J707 – Samedi 2 avril – San Martin de Los Andes à Perfect Bivouac – 21km D+560m


Heureusement que nous ne sommes pas le 1er avril, sinon vous auriez cru à un poisson d’avril, une farce vu le nombre important de kilomètres aujourd’hui! Mais non, c’est bien la réalité du jour et en plus, c’est un choix de notre part.
Ce matin, la douloureuse a eu lieu à 7h, un sacrilège en ce week-end. Le réveil fut si tot pour moi qu’il faisait encore nuit. Et s’il y a bien une chose que je n’aime pas, c’est me lever avant le soleil, comme en hiver en France, quand tout est noir, froid et non avenant! Je suis du soir, pas du matin, un point c’est tout! Mais, je ne suis pas la seule… Alors, après bien des encouragements personnels à moi-même puis aux loulous, on se décide à se lever tous les trois et rejoindre Sylvain déjà au fourneau pour le lait chaud. On se couvre, bonnets, polaires, doudounes, gants, sous-vêtements techniques et pantalons de ski : la totale quoi! Et à la frontale s’il vous plaît, pour ajouter à l’ambiance mystérieuse des lieux près de la rivière.


Autour de la table en bois, sur les cartons posés sur les bancs, les fessiers des enfants se posent pour le petit-déjeuner. Le camping a eu la bonne idée de mettre à disposition une fontaine d’eau chaude… idéale pour nos boissons indispensables du matin pour les adultes. Il a encore gelé cette nuit. Pendant qu’ils déjeunent, nous nous affairons dedans et autour de la tente, pour rassembler nos affaires. Le jour pointe son nez à travers les branchages lorsqu’elle est démontée et que tout rentre dans les sacoches étanches. Un record de temps! Mais c’etait programmé: la météo annonce de la pluie pour midi et il fait 7 degrés à cette heure-ci et aussi, à 9h, nous devons passer à la mercerie récupérer ma polaire et sa fermeture éclair toute neuve. C’est pourquoi on s’est activés tôt pour être à l’ouverture et ensuite filer pour éviter au maximum la pluie et monter sur le plateau. A 8h45, on décolle de notre camping et l’on traverse la ville, bien calme. Peu de boutiques et de restaurants sont ouverts. Une polaire plus tard et une boulangerie où nous faisons un petit écart, et 4 cyclos débarquent sur le bord du lac Lacar. Le ciel paraît menaçant sur les sommets des collines autour, alors la photo souvenir sur le ponton est vite prise avant de quitter San Martin et de longer son lac paisible sur 5 km.

Juste sur ces 5 km, on s’arrête plusieurs fois, à contempler les touches de bleu, de vert, de gris des collines qui plongent leurs flancs dans l’eau tranquille du lac étroit à ce niveau. Le cadre est magnifique et nous rappelle les fjords de l’île du Sud de Nouvelle Zélande. Quelques coureurs et cyclos nous croisent mais peu répondent à nos salutations… C’est souvent le cas dans les cités touristiques, en tout cas, c’est notre constat après avoir passé plus de temps dans des pueblos perdus. Cela n’entame pas notre motivation d’arriver au bivouac avant la pluie, de passer les 500m de dénivelé après ce début panoramique. Ces quelques kilomètres un peu frisquets se font bien, et les quelques pentes positives nous donnent vite chaud, ce qui est le bienvenu. Quelques campings sauvages sont affichés de part et d’autres de la 40, avant de quitter le lac vers l’ouest, et prendre plein sud. Le lac, lui, se poursuit quasiment jusqu’au Chili, tout proche.


Là, ça monte! Ça y est, je suis bien réveillée. Et la pluie commence. Branle bas de combat, pantalon de pluie, poncho et poches poubelles sur les pieds des loulous, complètement couverts maintenant. La pente est rude: 500m de D+ sur 13km, la chaussée mouillée, la recrudescence de la circulation sur cette portion, l’absence d’espace sur le côté droit et de klaxons ou mains levées qui nous donnent de l’impulsion… On s’exécute pour avancer, on pédale fort sur les 2 tandems, on passe les virages, on profite de la végétation des sapins, des couleurs rouges et jaunes des feuillus, des rares maisons en bois, et du coup d’œil sur le lac précédent, englouti par les collines et les nuages gris. On monte, on monte et ça fait plaisir de s’arrêter aux miradors. Les kilomètres passent, c’est inévitables, le temps jouent pour nous, et la pluie n’a plus d’incidence sur nous vu nos protections. Pour les adultes, pas la peine de se protéger, on a chaud, on transpire sous notre coupe vent, et on n’a qu’une envie, ne pas s’arrêter sinon le froid nous prend. Ça aide à progresser et à passer au col.

Sur le pont de l’Arroyo Partido, deux cyclos argentins nous croisent à la fin de leur boucle entre San Martin et Bariloche sur plusieurs jours accompagnés d’un chien errant qui les suivaient. Nous discutons et apprécions ce temps de partage avant d’entamer la descente. Notre bivouac et tienda pour se ravitailler pour demain sont à 19km. Chacun des voyageurs part vers sa destination. Un peu comme l’eau de la rivière que nous venons de traverser. Selon où sort cette eau soit l’eau part sur l’Atlantique par le Brésil soit sur le Pacifique par le Chili… Incroyable que cette séparation se fasse ici pour les milliers de km d’ici les océans.


Des coups de pédale, deux vraiment, et c’est parti… pour s’arrêter! Vous avez bien lu: un espace en herbe et mousse, avec quelques arbres et bosquets nous attendent pour le déjeuner. Il est déjà 13h, le temps passe vite et dans l’effort, nous n’avions pas pensé à manger! Pique nique au soleil avec l’arrêt de la pluie, quelques trouées de ciel bleu, quelques fourmis, quelques hésitations et explorations aux alentours…

Et si on restait ici pour le bivouac? Après 20km? C’est ça qui est chouette avec le vélo, avec le temps, ce luxe que nous avons encore un peu… C’est que nous pouvons transformer une journée froide, de pluie, d’endurance en une bonne et belle journée en prenant notre temps. En acceptant de prendre notre temps. En acceptant de ne faire que 20km pour apprécier ce que la nature nous offre: une rivière, une clairière de mousse et trèfles, un espace plat, des rings de pierres pour faire un feu, de la végétation tout autour pour être invisibles depuis la route et étroit d’accès (tout juste pour notre tandem et ses sacoches mais sans avoir à escalader ou soulever les vélos!), du silence… Le bivouac parfait! En top liste pour nous. Le lieu est une vrai invitation à s’y arrêter… On prend aussi en considération les prévisions météo pour les jours prochains. Il est annoncé 5 à 6 jours de perturbations, alors nous préférons monter le camp avant l’arrivée de la grosse pluie, car nous ne pourrons probablement pas faire sécher nos affaires avant un bon moment…
Et comme nous ne sommes qu’en début d’après-midi, nous pouvons prévoir un peu d’école, un peu de jeux, un bon gros feu avec le tarp au-dessus pour s’abriter de la pluie, un bon café thé avec l’eau de la rivière, une pause autour du feu tous ensemble à écouter des histoires en podcast, une bonne recette de soupe aux légumes achetés hier – pommes de terre, poireaux- avec des vermicelles… La pluie n’altèrera pas notre bien être du moment. On aurait tellement envie de vous le partager, de vous le faire vivre, que vous soyez là avec nous… C’est juste top!


Lorsque nous dégustons la soupe du cuistot autour du feu, il est presque 19h et nos papilles retrouvent des saveurs et textures que nous aimons beaucoup. La pluie reprend et nous sommes tous sous le tarp à éviter soit les gouttes soit la fumée du feu… et c’est dur pour nos yeux! On joue aux chaises musicales. Le repas terminé, la vaisselle faite dans le ruisseau, le feu réduit, les vélos sous le tarp pour que les sièges des enfants restent au sec, nous entrons dans notre demeure du soir.
10min de lecture ou de coloriage et 1h30 de film pour les plus âgés pour ce samedi soir! Je vous laisse sous la nuit étoilée avec la voie lactée, le son de l’eau qui coule sur les cailloux pour clôturer cette belle journée malgré tout.

J708 – Dimanche 3 avril – Perfect Bivouac à Camping Pichi Traful – 40km D+298 m


C’est Noël ! Non pas qu’il y avait des cadeaux dans mes baskets ce matin dans l’abside (car j’ai été très sage), mais la neige est venue jusqu’à nous. Et oui, à 1200m d’altude, près du Rio Partido, la pluie de cette nuit s’est transformée en flocons blancs que Sylvain a enlevé une première fois lors de sa sortie nocturne vers 2h00. Ce petit manteau blanc est magique dans cette clairière, tout droit sortie d’un dessin animé ou film fantastique… pour le plaisir des plus jeunes. Raphaël est le premier à aller au petit déjeuner autour du feu remis en action, vers 7h30, suivi des filles. Cela fait du bien et permet d’avoir la tente libérée pour en extraire les affaires et les remettre dans les sacoches blanches et gelées.

Pendant que nous nous activons pour nous réchauffer et tout remballer, les enfants partent après le repas expédié, inventer des bonshommes de neige très élaborés. Un des deux aura même sa bicyclette. Les doigts sont gelées entre la tente pleine de neige glacée et collée sur la toile, et la vaisselle dans la rivière. Chacun aura droit à ses doigts rouges que nous faisons revenir au coin du feu. C’est ainsi que vers 8h45, nous laissons le bivouac parfait en traversant la rivière à vélo pour le moins maladroit ou en empruntant le pont en neige pour les 3 autres, déambulant dans la forêt enchantée dans son duvet blanc.


La route 40 est rejointe à la suite, et heureusement, elle est dégagée, légèrement humide mais sans plus. Et ça, c’est une très bonne nouvelle. Une autre suit: une descente, idéal pour s’échauffer. Les montagnes ont toutes leur sommet saupoudré de neige, le niveau inférieur étant emprunt de rouge, jaune ou vert, puis d’herbe. Les rocs, les falaises grises déchiquetées apparaissent. La vallée se rétrécit parfois, avec juste l’espace nécessaire pour un champ, un camping (juste de l’herbe sans sanitaires…), une maisonnette en bois et du Arroyo Culebra. Les premiers kilomètres sont ainsi, assez reculés de la vie trépidante, de la circulation et l’agitation, porche de la nature, rustique par ces constructions. Après un tout petit col, le décor change: des cabañas en bois à louer, à acheter, de belles propriétés, des chalets sur les hauteurs de la montagne, comme un petit air de Montana.

Le soleil pointe un peu au-dessus des nuages blancs et nous parvenons au bout de 13km au mirador du Lago Machonico, déjà bien rempli par des voitures et un camping car… français (la plaque ne trompe pas!). Lorsqu’on y arrive (quelques secondes ou minutes après Sylvain et Emma), celle-ci me crie qu’ils sont français et qu’il y a des enfants, un large sourire sur le visage. On descend des vélos et discutons, alors qu’ils étaient en train de quitter les lieux. Le courant passe bien et ils nous invitent pour un petit café chaud. Le petit café/thé a duré 3h! Les enfants ont déballé les jeux de Léon, Céleste et Félix, ont pris d’assaut la table et les 4 places, ont augmenté le volume sonore, ont joué à cache-cache dans le camping-car, ont grignoté de l’apéritif, ont joué au trionimo, et ont enfin rempli leurs estomacs après 13h, histoire de recharger les batteries. Les adultes? Autour de café et de thé, on a discuté bien sûr! De voyages, de choix, d’envie, de confort, de vie puis des choses à voir au Sud de l’Argentine, au Nord jusqu’au Pérou (pour eux et la suite de leur voyage). On a pris l’apéro et dégusté une nouvelle bière: La Caravana. Attention cet après-midi, ça va fuser sur le vélo! C’était l’heure du repas, mais nous avions de la route: nous pour avancer sinon on n’est pas prêt de la voir cette ville d’Ushuaia, eux pour passer un coup de fil avant 19h, heure française donc 14h ici (sur San Martin pour la connexion). Mais, c’est dur de se dire au revoir, alors on partage un dernier moment autour de la table, tous les 9, dans des vraies assiettes. Royal! Le pire, c’est que l’on se fait servir.
Sachant que la météo doit se dégrader en fin de journée, on redevient sérieux et bravons le froid du parking pour retrouver nos bici qui ont attendu dehors. Des photos, des tours de parking pour les enfants et même pour Sarah, la courageuse… François, ce sera en France l’essayage ! Bye bye les copains, bonne route vers le désert, la chaleur, le dépaysement bolivien et argentin! Rdv à Saint Nazaire… mais c’est pas loin de chez Jean Yves et Françoise ? (Je le sens le tour de France à notre retour…).

On a les pieds presque dans les pédales mais quelques discussions avec des argentins (une dizaine il me semble, dont 3 cyclos venus du Sud) autour de nous, curieux de découvrir la folie qui nous entraîne vers le froid, nous apportent du baume au cœur. Allez, cette fois, c’est la bonne, capuchonnés de la tête au pied, nous retrouvons notre 40 et longeons le lac Machonico. Des sapins, des montagnes, des nuages, des lacs, des vaches sur la route, des voitures, des pouces, des bus entiers de touristes qui descendent à chaque mirador et remontent aussi vite, du vent, du froid aux mains, un Raphaël qui s’endort, une Emma qui chante, un kiosco fermé (celui escompté pour se ravitailler pour demain midi), de la pluie fine, un jeune Dario qui nous y offre des tortas fritas (sorte de beignets carrés) et des sucettes, un autre kiosco surprise ouvert où nous trouvons du pain et de la confiture maison, la cascade Vuliñanco, le lac Falkner et son arc en ciel, ces montagnes abruptes au sommet, le lac Villarino, le petit lac Escondido d’un vert intense et sombre, la belle descente aux virages successifs sur 200m de dénivelé négatif, ces sapins qui obstruent la vue du ciel et enfin le pont au-dessus du Rio Pichi Traful à 27km de notre rencontre avec la famille française…

C’est notre bivouac, notre fin de journée surprenante, magnifique, éblouissante de montagne et de sauvage, de lacs tous différents et alimentés par la cordillère. Et finalement la météo aura été relativement clémente, malgré le froid bien présent.
Il faut se dépêcher dans ce camping gratuit, ouvert à tous, pour se trouver le meilleur emplacement possible avant la tombée de la nuit et de la pluie, à l’abri du vent, sur du plat si possible. Casse tête réussi. Nous n’avons plus qu’à sortir la tente détrempée de neige de ce matin et monter l’extérieur pour qu’il sèche. Peine perdue, nous y accrochons finalement l’intérieur (mis dans une poche à part puisque sec ce matin) afin d’y protéger nos affaires. Il est 18h passé lorsque tout est en place sauf nos estomacs! Ils ont besoin de carburant. Pendant que les enfants sont censés travailler un peu d’école (après avoir joués dehors sous la pluie), la cuisson du repas se fait dans l’abside au chaud suivi de la dégustation dans la foulée. Pour compléter, le cuistot nous prépare des crêpes pour le dessert , agrémentées de sucre et de confiture maison.

Le froid nous emporte dans la chaleur de la tente, où la fatigue? Peu importe, c’est l’heure de se mettre en pyjama à la frontale et de sombrer pour certains seulement dans les songes. 21h25, je vous quitte au son des gouttes sur la toile sur ces quelques mots : « ça caille ici!!! ».

4 commentaires sur “Argentine – J707 et J708 – Il commence à faire un peu frais… mais c’est tellement beau !

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  1. Quels paysages merveilleux ! Les lacs sont d’un charme irrésistible ! Mais il vous faut affronter le vent et le froid. Je crains que vous n’alliez pas vers un adoucissement de la température, mais je ne vous apprends rien. Courage donc ! Vous n’en manquez pas, j’en suis persuadé. Nous qui vivons le printemps et allons vers l’été, voir la neige autour de votre tente ne nous tente pas, brrr ! Couvrez-vous bien surtout les mains et les pieds ! Bon, j’arrête de jouer les mères poules. En parlant de jouer, Michel Bouquet, qui était notre plus grand acteur vivant ne l’est plus (96 ans). Il avait créer Les Justes de Camus avec Maria Casares et Serge Réggiani en 1949 !! C’est juste pour l’info. Je vous embrasse et vous souhaite bon vent (c’est à dire dans le dos).

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  2. Merci pour les magnifiques photos de ces superbes paysages mais ça se mérite vu les conditions météo… Celles-ci n’empêchent pas les enfants d’en profiter tant mieux…
    Bon courage pour les affronter et bonnes continuation

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  3. Bonjour à tous les 4

    Magnifiques paysages , des couleurs divetses et variées et même de la neige. Je crois que c’est la première fois que je vois une tente enneigée et c’est la vôtre. Quel courage , pluie vent, neige , cailloux et plus encore, heureusement vous êtes récompensés avec cette nature extraordinairement belle.
    Couvrez vous bien , bonne route , bisous bisous

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  4. Le panneau Ushuaia est « annoncé » et bienvenu pour vous , il ne reste que 2507 kms !!!!! courage.
    Les paysages traversés sont sublimes : une cascade vertigineuse et un joli arc en ciel au loin , de quoi vous ravir sous ce climat plutôt rude en ce moment. Bon courage, prenez soin de vous Bizz

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