Argentine Patagonie – Immersion avec les cyclos de Pico Truncado – J743 à J747

J743 – Dimanche 8 mai – Las Heras à Pico Truncado – 80km


Toute la nuit, le vent a soufflé et fait du bruit dans les toitures du bâtiment, fait bougé les arbres tout autour. Cela souffle encore énormément ce matin, au point que Claudio et Bibiana nous envoient des messages pour nous demander de rester une journée de plus ici. Effectivement, c’est alerte avec des vents à plus de 110km/h à 7h. On prend donc notre temps pour petit-déjeuner dans la salle de réunion, non pas parce que nous restons aujourd’hui mais parce que nous attendons que le vent faiblisse. Et il le fait, vers 10h, pile quand tout est ordonné dans les sacoches, tout remis à sa place dans les locaux. Alors nous prévenons Bibiana pour les au-revoir et elle nous retrouve devant le bâtiment avec Nala, son chien! C’est dur, encore une fois, pour moi et pour elle. Alors, on commence la route avec elle devant dans sa voiture, dans les rues de Las Heras que nous visitons de nouveau, jusqu’au rond-point à la sortie de la ville. C’est ici que nos chemins se séparent, non sans être poignants. La route nous appelle une nouvelle fois et nous apercevons Bibiana près des lettres vertes de la ville dans nos rétroviseurs vers 10h40.

C’est parti pour une longue journée de vélo de 80km. Non, même pas! Le vent nous aide dès le début, avec de bonnes rafales. C’est aussi pour cela que nous voulions absolument partir, pour profiter de cet élément en notre faveur pour une fois. L’une d’elles me déséquilibre dans le seul virage du jour peu après notre départ, ce qui pousse ma roue avant dans une petite flaque de boue sur le côté de l’asphalte. Allez, hop, par terre le vélo et nous deux. Sylvain revient et une voiture dans le sens inverse s’arrête également pour nous aider à relever le vélo. Seul incident mais qui a eu le mérite de me réveiller pleinement et de prendre un peu plus en compte ce phénomène météo. De retour sur la chaussée, on repart avec cette fois, le vent bien de dos. Et que c’est bon de voir défiler le paysage à cette vitesse, sans trop d’efforts pour les cuisses et les bras qui maintiennent notre machine. Les buissons sont toujours autour de nous dans les teintes grises, le sol sableux, quelques bâtiments pour le pétrole, des clôtures, peu d’animaux. La route aurait pu être ennuyeuse, mais non! Déjà, par un petit incident technique dont seul Sylvain a le secret! Le câble de dérailleur doit être changé s’il ne veut pas être coincé à la même vitesse sur les prochains 60km. Et hop, concentration pour lui, photo pour moi, et pour Emma et Raphaël? Jeux bien sûr en hurlant, ce ne serait pas si drôle.
Retour sur notre ligne droite, direction plein Est, avec une petite colline à passer. C’est à la suite, que nous faisons plusieurs arrêts agréables. Grâce à la vidéo de la veille de Claudio, par 3 fois, des automobilistes nous ont reconnus et se sont garés devant nous. D’abord, Walter et Noémie, puis Nathalie, son fils Sébastien et Karen, et enfin 2 autres qui attendaient dans leur voiture derrière nous! Ils sont tous adorables, prévenants envers nous. Un petit mot, une photographie, des sourires et nous sommes gonflés à bloc pour continuer.

La suite de la route est toujours aussi agréable par ce vent, notre ami du jour puisque nous pouvons atteindre les 20km/h, pas moins que ça. Et nous, qui pensions mettre la journée pour une telle distance. Même pas. On a réussi à envoyer un message aux copains pour leur donner notre heure de départ ainsi que le temps mis pour les premiers kilomètres (1h= 24km, on n’est pas peu fiers, même si ce n’est absolument pas de notre faute!!), histoire qu’ils ne nous attendent pas trop. La réponse de Mauricio nous laisse comprendre que nous les verrons peut-être sur la route. On espère les apercevoir à l’entrée de Pico Truncado pour rouler tous ensembles dans leur ville.
Pour l’instant, ce sont les éoliennes (1% de la production électrique) et les puits de pétrole (qui couvre 32% de la consommation d’énergie primaire) qui nous accueillent. Elles ne grandissent pas très vite, dommage, elles nous semblent si loin, et si nombreuses pendant trop longtemps. C’est que cette ligne droite interminable, ne nous donne aucun repère sur notre avancement, que ces géants. Alors, on garde le cap, impossible de se tromper: il n’y a qu’une route, la 43!

On avance, on grignote car il est encore tôt par rapport à notre départ, et que l’on désire le plus possible utiliser ce vent dans le bon sens. On ne sait jamais, il pourrait changer d’avis et devenir impitoyable. ON se sent en forme avec Sylvain, en rythme en tout cas pour retrouver nos copains. Et puis, peu avant le seul village sur cette portion, Koluel Kayke, à 61km de Las Héras, Raphaël s’agite. Nous, il n’en a pas marre de son siège. Non, il n’a pas perdu son bout de bois fétiche depuis 2 jours. Il crie, il a vu les copains. Quoi? Le Pickup qui traverse la voie et qui se gare sur le bas côté, ce sont eux? Le second pickup derrière qui fait de même complète ce groupe d’amis? Et bien oui. Il a de bons yeux mon loulou et est tout excité: « C’est les copains, c’est les copains! ». Fou comme on s’approprie une rencontre de quelques minutes dans une station service, datée de 3 mois… C’est que chacune est décuplée en émotions. Celle-ci en est un exemple. Eux, comme nous, n’avions pas oublié cette entrevue à Belen. C’est pourquoi, nous débordons d’énergie en les retrouvant, se serrant dans nos bras, heureux!
Ils sont en tenue de cyclo, Bibi, Mirna et Chule, leur vélo à l’arrière des voitures, tandis que Mauricio, Beto et Adriano, conduisent, prennent des photos, font la voiture balai, filment et nous encouragent sur les 20km qu’ils restent pour aller jusqu’au Quincho. Marcella dans sa voiture, a rejoint la tribu. Nous prêtons nos tandems à deux d’entre eux. Le Panzer pour Chule et le Couillot pour Bibi. Le rythme est bon pour des novices du vélo double. C’est juste extra de partager ce bout de route avec eux, de discuter, de rigoler, de le vivre tout simplement avec eux. Nous effectuons un petit arrêt tout de même seulement quelques minutes après ces retrouvailles pour casser la croute pour nous 4. Et oui, on en a oublié de déjeuner, enfin, on pensait le faire à ce village! Voici donc le peloton du club Kumtru de Pico Truncado qui roule sur la 43 en file indienne (j’avoue ne pas avoir vu grand chose du paysage, inchangé depuis ce matin vu mon attention à parler espagnol avec Mirna sur le vélo!) jusqu’à la sculpture d’un dinosaure à partir de chute de morceau de métal inutilisé pour les puits de pétrole, recyclés pour l’occasion: tuyaux, trépans, boyaux, tiges de pompage et chaînes. Un hommage à ces mastodontes du jurassique et crétacé à l’origine de l’or noir découvert sous ces parcelles de Santa Cruz. Quelques photos avec lui, tous ensembles, au grand plaisir des enfants et surtout Raphaël, connaisseur hors-paire en la matière.

On finit par se laisser guider par nos compères cyclo dans la ville, Chule en tête. Nous arrivons chez Beto et Bibiana, et passons directement dans leur Quincho. « El quincho », en Argentine et dans les pays voisins, est un espace ou un lieu d’un bâtiment spécialement équipé pour la préparation et la dégustation d’asado. Ici, avec évier, four, plaque en plus pour compléter le barbecue, table pour 15 personnes, espace pour chanter ou danser, les sanitaires, le tout fermé pour les journées et nuits fraîches. On adore le concept ( à importer en France?) et on adore le barbecue. La fin d’après-midi est passée trèèèèèèès vite:
Nous avons mangé des viennoiseries qu’ils avaient installées pour nous, du lait, des jus et du thé. Nous nous sommes installés dans deux chambres à l’étage de la maison de Bibi et Beto. Nous avons pu prendre une douche. Nous avons écouté une séance de karaoké, digne de ce nom, entonné par nos amis. Bravo aux chanteurs d’ailleurs (même Raphaël a osé chanté « Le lion est mort ce soir »). Nous avons dégusté, apprécié, savouré un asado digne de ce nom entouré de personnes incroyables. Un moment rare et intense où vous avez l’impression de faire partie d’une famille pendant un instant. On le prend ce moment avec toute son aura de gentillesse de leur part. Les photos parlent d’elles-mêmes.

Pépino, le frère de Mauricio et Adrian, nous retrouve ici pendant toute la soirée et une partie de la nuit. Jusqu’à minuit au moins, pour me fêter mon anniversaire avec la bougie en plus sur la glace! C’est donc bien entourée que je la souffle et entame follement cette année! Quelle surprise de le fêter ainsi, un plaisir de le partager, à jamais gravé dans ma mémoire, dans nos mémoires, dans notre voyage, dans notre vie. Merci à eux, Merci du fond du coeur à vous tous. Vous êtes des êtres extraordinaires!


J744 – Lundi 9 mai – Pico Truncado off

Jour particulier pour moi puisque je prends un an de plus, 44 ans et toutes mes dents encore. Après l’avoir fêté au Panama, c’est en Argentine que nous le fêtons. Mirna et Chule nous invitent tous à venir autour de leur table pour le déjeuner qu’ils ont préparé: poisson et sa panure maison (merci pour la recette à base de chapelure de pain et de flocons d’avoine) et purée aux 2 pommes de terre.

Pendant que Beto et Sylvain partent chercher une fenêtre tout l’après-midi, les enfants jouent. Raphaël regarde des documentaire et Emma cuisine une tarte aux pommes avec Mirna. Une partie de la pièce à vivre m’est interdite… Surprise ! Pendant que j’avance sur le blog et que je discute avec eux en buvant thé sur thé, les garçons reviennent. Les enfants sont soulagés car il commence à faire nuit et que ce ne sera plus l’heure de souffler les bougies et d’ouvrir les cadeaux! Encore un moment de partage que ce groupe damis nous octroyent autour du goûter.


J745 – Mardi 10 mai – Estancia « Sin nombre »

Aujourdhui, c’est immersion dans la vie de Chule et Mirna, dans l’estancia de leur famille, d’origine écossaise. Ils nous y emmènent en voiture sur 60km dont 40 de ripio pour accéder à la propriété « sin nombre ». Javier, qui travaille et vit seul dans cette estancia, à une heure de la ville, a tué et préparé un agneau du troupeau en notre honneur, qui cuit dans une grosse marmite sur le barbecue jusqu’à 13h30. Chacun vaque a son loisir: partage de maté, jeux d’échecs, jeux de ballon, photos, recherche de pointes ou flèches d’indigènes dans le terrain de 2 500 hectares datant de 300 ans environ.

Le repas est pris dans la maison, tous ensembles, dans une ambiance très conviviale. Le plat est succulent, la sauce délicieuse que nous reprendrons plusieurs fois, et en bonne compagnie. Le secret d’un petit coin de paradis. Les enfants peignent pendant que les adultes commencent un tour de marche. Javier et Chule proposent ensuite un tour de cheval pour Raphaël puis Emma, dans un enclos. Ce qu’ils sont fiers les loulous et préfèrent cette monture!
L’après-midi touche à sa fin, lorsque nous faisons nos « Au revoir » à Javier. Il offre un énorme cadeau aux enfants: des pointes de flèches en superbe état qu’il a trouvé sur sa propriété. On se retrouvera dit-il, dans 4 ans! Ok, le rendez est pris… avec plaisir.
Nous n’allons pas trop loin. Sur ces terres, Chule et Mirna possèdent une maison en construction. L’heure est à la visite, au nettoyage du poulailler, au maté pour eux autour de discussion tous ensembles. Avant la nuit, nous retournons chez Beto et Viviana où un dernier moment convivial nous réunit tous dans leur Quincho. Des au-revoirs tardifs tellement nous sommes bien.

On a rencontré beaucoup de monde au cours de ce voyage. Des moments riches à chaque fois, on le dit toujours, et c’est vrai. D’ailleurs on se souvient de tous, de tous les visages, des moments associés, c’est la grande richesse de ce projet. Mais il y a des rencontres particulières… Pour les plus récentes, Claudia et Juan à Abancay au Pérou, Ariel à San Juan en Argentine, Gisèle à Chos Malal pour l’anniversaire de Raphael… Il y a désormais toute l’équipe de ce club de vélo de Pico Truncado. Ces 2 jours entiers passés en leur compagnie nous marquerons. Quel accueil! Ils nous ont offert tant de gentillesse, se sont adaptés à notre timing, nous ont permis de découvrir un autre visage de la Patagonie, celui d’une ville de travailleurs en plaine, où les ressources sont étonnamment diversifiées. Ici se côtoie le pétrole, le gaz, l’éolien, les mines d’or et d’argent. En revanche, pas ou peu d’eau… toute cette région de la Patagonie n’est pas irrigué, ce qui nous aide à comprendre l’éloignement des villes ou villages et autant de surface désertique.
Sylvain a particulièrement apprécié la découverte de l’Estancia et ses 1000 moutons, de part ses origines plutôt rurales.
Alors demain, on repart, et Beto a la gentillesse de nous reconduire sur la route 40 de laquelle nous nous sommes déroutés de 300 km pour venir spécifiquement à Pico Truncado, mais ces 2 jours forts et si riches seront gravés longtemps. Merci chers amis, au plaisir de vous voir un jour en France !

J746 – Mercredi 11 mai – 250km – Pico Truncado à Perito Moreno en voiture.

Beto avec la camionnette de Chule, nous ramène à 8h ce matin, dans la bonne direction: la route 40 et la ville de Perito Moreno. La route est semée de guanacos mais pas de tortas fritas, comme on l’espérait. Ces 3h passent vite avec lui. Nous le quittons en centre ville, devant la poste où un colis surprise envoyé par Andrea et Loli rencontrés à Malargue, nous attend. L’émotion est là après tant de moments si intenses ensembles. Merci encore à lui, à eux. On n’est pas près de vous oublier!

Après avoir quitté Beto et trouver une boulangerie que nous dévalisons, nous nous dirigeons vers le camping municipal. Celui-ci est fermé depuis la pandémie, mais Viviana, à l’entrée, nous ayant vu sur internet, nous propose d’appeler le gérant. Celui-ci nous prête une cabaña avec 4 matelas. Nous y restons la soirée et le lendemain, J747, Jeudi 12 mai, pour laisser passer la perturbation et la pluie. Un peu de cuisine dans la pièce commune chauffée, visite de la ville et après-midi cinéma pour ce jour d’attente pour nous 4. Demain, l’aventure sur la route est répartie!

7 commentaires sur “Argentine Patagonie – Immersion avec les cyclos de Pico Truncado – J743 à J747

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  1. Vos rencontres là encore sont d’une grande richesse assurément,et confèrent à votre aventure l’authenticité des habitants rencontrés chaleureux, généreux et époustouflés par ce que vous avez entrepris par ce voyage à vélo,long,usant,et en marge de sa réussite totale.
    Ce reportage magnifique est émouvant,texte et photos à l’appui. Bravo.

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  2. Une fois de plus , quelle hospitalité généreuse ! Il est certain que votre voyage en famille en bici , votre descente vers le sud , à contre-courant de ce que voudrait la logique puisque vous allez faire du plus froid, suscite intérêt et admiration. Grâce à votre « slow life » vous faites des rencontres formidables et les enfants , tout comme vous , vont rentrer riches de nombreuses expériences ! Continuez avec le vent dans le dos !

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  3. Bonsoir les aventuriers,

    Cela fait chaud au coeur de vous voir tellement chouchoutés par tous ces Argentins, quelle générosité, chaleur, convivialité, des souvenirs à tout jamais. Profitez bien de ces partages tellement mérités.
    Bonne continuation ,vent dans le dos je vous souhaite.
    Gros bisous à tous les 4

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  4. Qu’est-ce que ça fait plaisir de vous voir aussi bien accueillis et heureux avec vos amis ! Encore plein de beaux souvenirs emmagasinés et plein de courage pour la suite… Alors bonne continuation à bientôt
    Annie-France

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  5. La joie de vivre, la bienveillance, tous ces sourires, leur générosité, l’émotion à chaque image ! Ces instants partagés, riches de sentiments forts, on voudrait qu’ils durent toujours. Je vous le souhaite de tout mon cœur jusqu’à l’aboutissement de ce projet fou mais ô combien enrichissant pour Emma et Raphaël, autant que pour vous qui, sans aucun doute, vous auront doté d’un autre regard sur le monde américain si contrasté du nord au sud, et pas seulement sur le Nouveau Monde, mais aussi sur l’Ancien, le nôtre européen. Notre vieux monde en perdition selon les Cassandre. Vous êtes l’exemple d’une prise de conscience de nos erreurs et d’un espoir possible. Tous mes vœux pour la suite. Je vous embrasse fort tous les quatre.

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  6. Dans ce monde fou, fou, fou où nous vivons , il est réjouissant et réconfortant de trouver autant de générosité, d’échange, d’amour, de bonheur, de gentillesse ……. mercis à eux d’avoir été aussi généreux envers vous, de vous avoir chouchouté et été si précautionneux à votre égard, mille mercis à eux tous , très heureux pour vous d’avoir été au cœur de ces rencontres. Des instants qui resteront dans vos mémoires, trop belle expérience. Prenez soin de vous bizz

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